Histoire des communes

Anecdotes : Montigny-le-Gannelon

La légende de la dame de Montigny

Elle fut racontée avec plusieurs variantes. En voici une inspirée de celle qui parut dans l'Echo Dunois, le 25 janvier 1851.

Depuis près de deux ans, le seigneur Châtelain Jean de Montigny était parti pour de lointains pays où la guerre avait porté ses ravages. Il avait laissé dans son château son épouse et quelques serviteurs.

Le châtelain était loin de ressembler à son épouse. Celui-ci était très affable et rempli de bonnes qualités ; celle-là, au contraire, était dure et hautaine : aussi ses vassaux la craignaient-ils, car ils avaient à souffrir de son mauvais caractère lorsque le seigneur partait pour quelque voyage.

Son retour était, en revanche, toujours attendu avec impatience et son arrivée était fêtée avec une grande joie de la part de ces pauvres gens.

De jour en jour, on espérait le bon châtelain et des mois entiers s’écoulaient sans aucune nouvelle.

Ce fut dans ces mêmes temps que la Dame châtelaine rencontra un soir une mendiante accompagnée de ses sept petits enfants qui semblaient avoir tous le même âge. La pauvre femme s’approcha d’elle, lui demandant quelque aumône pour le soutien de sa famille. Mais la dame la regarda dédaigneusement et, se moquant honteusement d’elle à cause de ses sept enfants, la repoussa avec dureté en disant : « Quand on ne peut élever ses enfants, on n’en fait pas comme une lapine. »

Devant cette attitude, la mendiante qui n’était rien de moins qu’une sorcière, lui répondit : «Vous riez de moi, Madame, mais pour votre punition, vous aurez, en une seule couche, un nombre d’enfants plus élevé que celui autour de moi ! »

Après ces paroles, elle disparut et la châtelaine se retira, riant beaucoup de ce que venait de lui dire la mendiante.

Moins de deux mois après, la dame de Montigny mit au monde neuf enfants qui naquirent le même jour. Elle devint furieuse et ordonna que l’on se mit à la recherche de la maudite sorcière, mais ce fut en vain.

Puis, ayant fit venir une de ses femmes, elle dit : « Mon mari doit revenir bientôt. Comme je redoute sa colère, enlève huit de ces marmailles et va les jeter dans les eaux du Loir. »
La servante renferma dans un sac les huit enfants désignés et elle se dirigeait, favorisée par la nuit, vers le Loir qui baigne la base des coteaux de Montigny lorsque, tout à coup, elle entendit devant elle un grand nombre de cavaliers et d’hommes d’armes à pied. A leur tête, elle n’eut pas de peine à reconnaître son seigneur et maître. Celui-ci lui dit : « Où vas- tu ma mie ? » Elle lui répondit qu’elle allait noyer des petits chiens. Mais son maître lui ayant demandé à les voir, elle fut forcée de tout avouer.

Le bon et brave châtelain fut tellement pénétré de douleur en apprenant les fautes de son épouse qu’il entra, contre son ordinaire, dans un grand courroux et jura de la punir. Il fit élever secrètement les huit enfants dans le village de Montigny, mais n’en souffla mot à sa femme.

Plusieurs années s’écoulèrent lorsqu’un jour, le sire de Montigny découvrit des poésies galantes à l’adresse de la châtelaine et une mèche de cheveux blonds. Sa décision fut rapide.
Au jour de leur septième anniversaire, il fit venir tous les enfants au château et, les ayant tous vêtus de même y compris celui qui vivait avec eux, il envoya chercher sa femme et, après lui avoir lu plusieurs passages de poésies, il lui dit : « Madame, où est votre enfant ? Montrez-le moi ! »

Elle ne le put, car ils étaient très ressemblants ; devenue confuse, elle se jeta aux pieds de son mari, mais il la repoussa et lui dit : « Quel supplice avez- vous mérité ? .

Celle-ci répondit qu’elle méritait d’être jetée par la plus haute fenêtre du château, enfermée dans un tonneau garni de lamelles de couteaux à l’intérieur. Le châtelain ayant donné ses ordres, on lui mit, en plus, la mèche blonde dans les mains. La dame roula, ainsi enfermée, jusque dans le Loir.

Le courant l’entraîna bien loin de là. Un homme d’armes la suivait et criait aux curieux :
« Laissez passer la justice du Seigneur de Montigny ! »

Enfin, la malheureuse étant arrivée vers le soir entre Saint-Claude et Saint-Jean, villages situés au-dessous des Bouches de l’Aigre, sur le Loir, elle se mit à crier merci. L’homme d’armes qui devait la suivre jusqu'à Saint-Jean, pour la retirer morte ou vive, eut pitié de ses plaintes. Il attira la cruelle machine vers le bord et en fit sortir la dame dans un piteux état. Elle demanda un vêtement pour se couvrir ; il lui apporta son manteau et, quand il l’eut mis sur elle, elle s’écria : « Ah ! froid mentel. » Telles furent ses dernières paroles.

C’est depuis cette époque que les villages de Saint-Claude et Saint-Jean portent le nom de Froimentel.

Il existe dans l’église de Saint-Claude Froimentel, une pierre tumulaire, autour de laquelle sont gravés ces mots : « Cy gist feun noble home Jehan de Montigny, en son vivant, seigneur de Ville-Puere, qui trespassa le 14 may 1545. »

Peut-être ce seigneur est-il un descendant de celui dont il est parlé plus haut ?

C’est volontairement que le sexe des enfants n’est pas précisé, car, sur ce point, les légendes diffèrent.


Saisie : Laurent HAUVILLE

Dernière modification : 30 Janvier 2008

 

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