Histoire des communes

Saint-Calais : Prison (ancienne)

Voir aussi :
 

Quand les détenus s'évadent, les geôliers trinquent

Monsieur Vidal, gardien-chef de la prison de St Calais, est apprécié par les autorités supérieures.
Il vient de recevoir les félicitations de l'administration pour son travail.

Il est seul pour surveiller neuf prisonniers.
Monsieur le directeur de la circonscription pénitentiaire de Fontevrault (dont dépend St Calais) le reconnaît;
«Il ne peut être partout à la fois
- tenir ses écritures
- aller à la poste
- surveiller les prévenus et les condamnés
- recevoir les visiteurs»

Un de ces détenus se nomme Auguste Bray. Natif du Mans, il a 17 ans. Il est écroué depuis le 18 décembre pour vol d'une somme de trois francs. C'est un récidiviste, une condamnation à l'amende pour la pêche et deux condamnations par défaut pour vol.
Conformément aux prescriptions habituelles, ce jeune garçon a été placé dans le quartier des femmes inutilisé pour l'instant.

En ce dimanche 22 décembre 1907, M. Vidal vaque à ses occupations.
A quoi pense-t-il?
Qu'est ce qui le perturbe pour être aussi négligent?
Toujours est-il qu'il commet une faute incroyable pour un gardien de prison; Il omet de verrouiller une porte!

«Après la soupe vers neuf heures et demie ou dix heures, le gardien-chef mit Bray sur le préau et négligea sûrement de fermer la porte de l'atelier qui donne sur le dit préau. M. Vidal dans ses explications prétend avoir fermé la porte et l'avoir probablement rouverte en même temps. Il aurait dû s'assurer si cette porte était réellement fermée; Il ne l'a pas fait.»
(extrait du rapport du directeur de la circonscription)

Quelle belle aubaine pour Auguste Bray!
Il comprend tout de suite qu'il a une occasion «de se faire la belle».

Il sort le mobilier de l'atelier et commence à l'entasser. Une grande table, une petite table, deux tréteaux, deux bancs et voilà un bel échafaudage!
Le jeune détenu est en forme et rien ne l'effraie...la suite va nous le prouver!

Il grimpe et se retrouve sur le mur de ronde à trois mètres de hauteur.
Il se laisse glisser de l'autre côté en suivant un tuyau et tombe sans se faire de mal.
Le voici maintenant dans le chemin de ronde. Comment sortir de là?
Après un bref examen du mur d'enceinte, il aperçoit une lézarde. Entassant de la paille oubliée à cet endroit, il se hisse jusqu'à la fente, fait tomber quelques pierres pour prendre appui et arrive au haut du mur de sept mètres.
Au-dessous de lui, la terre meuble du jardin de la gendarmerie.
Il saute et s'enfuit...

À deux heures moins le quart, M. Vidal arrive en courant à la gendarmerie:
«Venez vide un détenu vient de s'évader».
Tout le personnel cerne la prison (située dans la cour de la caserne, voir croquis ci-dessus) mais en vain.

Branle-bas de combat, le signalement de notre athlète est diffusé dans toutes les gendarmeries des environs:
«1,55 m imberbe, figure blanche, yeux noirs, vêtu d'un gilet de travail et d'un pantalon gris, coiffé d'une casquette de cycliste et chaussé de bottines». (rapport de la gendarmerie de St Calais )

On retrouve la trace d'Auguste Bray à Coudrecieux. La nuit interrompt les recherches. Le lendemain, à la première heure, il est repéré du côté de St Michel-de-Chavaignes. La brigade de Connerré le capture quelques temps après.























Auguste Bray réintègre la prison de St Calais le lundi soir à quatre heures.
Sa tentative a échoué. L'histoire ne dit pas ce qu'il est devenu.

Par contre, les problèmes de M. Vidal ne sont pas terminés.
Sa négligence est évidente.
Monsieur le directeur de Fontevrault pense qu' « en raison de ses bons services antérieurs son changement de résidence par mesure disciplinaire sans rétrogradation aucune avec blâme sévère serait suffisant ».
Monsieur le sous-préfet « partage cette manière de voir ».
Monsieur le procureur de la république « estime même qu'un blâme sévère serait suffisant ».

Le gardien-chef fut puni d'un blâme sévère et d'une amende... et continua à verrouiller les portes de la prison de St Calais.

(D'après les documents des archives départementales de la Sarthe)


Saisie : Annick BRAS

Dernière modification : 18 Mars 2018