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Nogent-le-Rotrou : Pados

 

De l'origine de Pados !

Le Nogentais 28/07/1908 - Chronique du tramway – Pasd’eau ou Pados ? Question d’orthographe

Le nouveau tramway n’aurait-il donc été construit que pour susciter des discussions ? On le dirait, il est dénommé par l’administration : Tramway de Brou à Nogent, et les Nogentais – avec raison – voudraient qu’il fût le tramway de Nogent à Brou. Ceux de Brou prétendent que les voyageurs ont plus de temps à dépenser à Nogent qu’à Brou. A quoi les Nogentais répliquent : l’horaire est en faveur du marché de Brou : il ne tient pas compte du marché de Nogent. Bien plus : allez à Brou, vous aurez la correspondance avec les trains de l’Etat ; venez à Nogent, pas de correspondance avec les trains de l’Ouest. On croirait que c’est une gageure.

Mais en voici bien d’une autre.

Le premier arrêt facultatif, au sortir de Nogent, est appelé, dans l’horaire officiel de la Compagnie du tramway Pados. Lisez l’horaire dans les journaux de Nogent. Ce n’est plus Pados, mais Pasd’eau, Pasdeau ou même Pasd’eau.
Qui a raison ?

Cette fois, pour cette fois seulement c’est l’administration. Elle écrit comme on doit écrire : Pados.

Mais pourtant dit un vieux Nogentais Pasd’eau est bien clair ; Pasdeau a un sens, il signifie « passage d’eau ». De fait, Pasd’eau possède un pont, un joli pont sous lequel s’écoule l’eau de la rivière la Berthe. L’explication est plus naïve qu’originale et celui qui l’a trouvée ne s’est pas mis, évidemment, l’esprit à la torture. Pascal, au moins avait inventé une belle formule quand il écrivait : « Les rivières sont des chemins qui marchent ».

Si un village pouvait se nommer Pasd’eau parce qu’il y a, tout auprès, un « passage d’eau », il semble que dans un département, ou même dans un simple arrondissement comme celui de Nogent, le nom de Pasd’eau devrait être fréquent. On trouve par exemple en Eure-et-Loir, 14 l’Aunay, 23 Bel-Air, 22 La Borde, sans compter 13 Les Bordes, 25 La Haie ou les Haies, sans parler de 11 La Haye ou les Hayes, etc. etc. Et bien qu’il y ait plus d’un village situé près des ponts ou le long des prés fleuris qu’arrosent la Rhône, la Cloche, la Jambette, la Berthe et tant d’autres rivières, il n’y aurait qu’un seul Padsd’eau ?
Ce serait invraisemblable, si Pasd’eau n’était pas une naïveté.

Pados, au contraire, ne semble pas avoir une signification précise. Mais beaucoup de noms propres en sont là, parce que leur origine est inconnue et se perd dans la nuit des temps. C’est ce qui milite en faveur de l’orthographe traditionnelle ; on ne devrait jamais la changer. Les savants, ceux qui ont consulté les vieilles archives et déchiffré les vieux parchemins, n’ont jamais trouvé que Pados. C’est Pados qu’écrit M. Lefèvre, dans le dictionnaire géographique des communes, etc. d’Eure-et-Loir (Chartres, Garnier, 1856) ; c’est Pados que répète le savant archiviste M. Lucien Merlet, dans son dictionnaire topographique (Paris, imprimerie impériale, 1861) et dans son Dictionnaire des hameaux d’Eure-et-Loir (Chartres, Selleret, 1887). Dans la préface de ce dernier ouvrage, M. L. Merlet dit ce qui suit : « Notre grande histoire des noms des localités du département, notre commerce journalier avec les titres anciens, où tous les lieux habités, jusqu’aux plus modestes fermes, sont plus d’une fois mentionnés, nous ont permis de donner l’orthographe réelle d’une foule de hameaux et de lieux-dits défigurés et devenus souvent méconnaissables. »

La question est donc tranchée. C’est Pados qu’il faut écrire, avec les savants archivistes d’Eure-et-Loir, avec l’administration préfectorale, avec la carte d’état-major. Pados est l’orthographe des anciens documents. Pasd’eau est un non-sens.

ECRIVONS DONC DESORMAIS PADOS ET NON PASD’EAU.
C.C.

Le Nogentais 02/08/1908 - Choses locales – PASDEAU, PADOS ou PAS D’OS

M.C.C. (pourquoi ne pas signer en entier) s’imagine assurément qu’après lui on va enlever l’échelle et que l’orthographe de Pasdeau, ou Pados est irrévocablement fixée, grâce à lui. Nenni, mon brave ; vous oubliez le conseiller du Paty, qui, lui aussi, se croit très fort en matière d’étymologie. D’abord posons ce principe, qui est tout l’opposé de ce que ce bon monsieur nous explique : tous les noms signifient quelque chose, et la nuit des temps qu’il évoque n’est pas assez obscure pour qu’on ne puisse y voir clair. Si le mot a tellement vieilli qu’il est devenu incompréhensible, il n’en a pas moins sa signification, devrait-on aller la déterrer dans le germain, le gaulois, ou toute autre langue disparue. Tel n'est pas le cas pour notre Pasdeau ; c’est un pur français, et tout le monde peut comprendre.

Qu’avons-nous besoin aussi, nous autre Nogentais, qu’on aille nous chercher un dictionnaire géographique imprimé à Chartres, ou M. l’archiviste Merlet et son dictionnaire topographique. Tous ces bonhommes n’étaient pas de Nogent. Ils ont répété une erreur, une faute d’orthographe, et rien de plus. De là à croire que nous autres Nogentais nous allons couper dedans, c’est pas vrai. Que les Beaucerons écrivent tant qu’il leur plaira « Pados », nous autres du Perche nous écrirons « Pasdeau ».

Il est plutôt cocasse ce mot Pados : on croirait un mot grec, comme Pharos, Paros, Antiparos. Bons archivistes, n’allez point nous faire accroire, pendant que vous y êtes, qu’une colonie grecque s’était établie à Pados. Nous avons eu assez des Romains et des Anglais ; nous en avons déjà même eu de trop. Les Nogentais, qui ne sont pas archivistes, ni même archéologues, y avaient trouvé une toute autre étymologie : « Pas d’os » faisait allusion, à leur avis, à certaine marchandise que détient maître Bertrand, où comme chacun sait il n’y a pas d’os. Le Perche était en pays gaulois….

Pas d’eau est un non sens, nous affirme M.C.C. Qu’il me permette de n’être pas de son avis. Pas d’eau signifie un gué, un endroit où on met le pied dans l’eau en sautant d’une pierre sur l’autre ; le pont est relativement récent, et jadis on faisait un pas dans l’eau pour traverser. Le même M.C.C. s’étonne qu’on n’ait pas donné le nom de Pas d’eau à tous les lieux situés auprès de l’eau ; encore faudrait-il que pour tous les lieux cités l’on sache si on y passe à gué. En tout cas, sans me donner la peine de faire de longues recherches, je trouve dans le département de l’Orne le Pas-Saint-Lhomer, où assurément il se trouve un gué.

Un jour, étant à Paris, j’ai entendu fournir une explication toute inverse du mot Pas d’eau. Comme j’avais décliné mes nom et prénoms et lieu d’origine, selon l’usage, le bon hôtelier se prend à rire aux éclats : « Vous êtes de Nogent-le-Rotrou, s’esclaffe-t-il, j’ai entendu parler de ce pays-là. N’est-ce-pas là qu’il y a un moulin qui s’appelle Pas d’eau » ? Et tout l’entourage de partir d’un rire homérique en entendant parler d’un moulin qui n’avait pas d’eau. C’est presque confus que je fus obligé d’affirmer qu’il y coulait bien véritablement de l’eau, dans une véritable rivière, sous un vrai pont ; mais que le mot avait signifié à l’origine un passage à gué où on faisait un pas dans l’eau. C’est absolument ce que je répète aujourd’hui, et je crois avoir raison, n’en déplaise à tous les archivistes et faiseurs de dictionnaires géographiques du monde entier.

Au même M.C.C j’ai également le regret de dire que Pascal n’avait fait qu’imiter la belle formule « les rivières sont des chemins qui marchent », pas plus d’ailleurs qu’il n’inventa la brouette. Rabelais avait dit « les chemins cheminent », et on a des modèles de brouette antérieurs à Pascal. On ne prête qu’aux riches.

Maintenant, pour mon propre compte, je vais fournir aux étymologistes chercheurs les noms suivants : Charroyeau, ou l’on charroyait à gué, Planchepéhu, où l’on traversait sur une planche péhue sur la rivière. Je me suis toujours imaginé, à tort ou à raison, que péhu devait être un ancien mot qui pouvait bien signifier posé. Planche péhue, planche posée. Je me confesse d’avance de mon ignorance, et j’en appelle à tous les archéologues, étymologistes qui voudraient bien m’éclairer.
A.FILLEUL

Réponse de G. Fauquet (même journal, même jour)

Si les Percherons ne sont pas férus d’étymologie, ce ne sera pas la faute du Nogentais. Nous voilà partis maintenant sur Pasd’eau, et ce village où ne coule pas d’eau, ou si peu ; a l’air décidé à faire couler davantage d’encre. Il nous faut bien pourtant aussi dire notre petit mot. Pados ne nous satisfait guère ; Pasd’eau un peu plus. Le nom serait banal, c’est vrai, mais il peut avoir une origine autre et qui est peut-être la bonne.

Une de nos vieilles chartes n’orthographie-t-elle pas « Padoe » ou « Pasdoe », et n’est-ce point là une corruption toute naturelle de « Pasdouet » ? On sait que le mot « douet, douit, d’huis » existe toujours en Normandie et même au Perche pour désigner une mare, une source, un lavoir ; « Pasdouet » signifierait donc passage du lavoir, pour aller au lavoir qui se trouve effectivement au-dessous des maisons. Questionnez des vieux habitants du lieu, vous verrez à leur prononciation, que de ce lavoir pourrait bien sortir la vérité.

Un mot pendant que nous y sommes, à M. Filleul. En matière de noms propres, il faut être prudent dans les assimilations. Ainsi il nous parle du Pas-Saint-Lhomer, « où assurément il se trouve un gué ».

Il serait possible qu’il y ait un gué dans les parages, bien qu’il n’y ait pas de cours d’eau dans le village, mais il est admis par tout le monde que l’origine de ce nom vient de l’empreinte du pied de Saint-Lhomer,fondateur du lieu, restée dans un rocher quelconque, légende dont on trouve des variantes un peu par toute la France, notamment près de Mortain.

Pour en revenir à Pasd’eau, n’a-t-on pas aussi, en faveur de cette orthographe, l’exemple de Passau , en Bavière, qui semble tenir son nom de sa situation au confluent de trois grands fleuves ou rivières, ce qui force à constamment passer l’eau ?

Troublant point d’interrogation dressé sur la tête des étymologistes et capable de les entraîner à des discussions sans fin, à moins qu’ils ne trouvent qu’il ne soit plus sage de C.C. ?
G. FAUQUET


Source : Le Nogentais

Saisie : Christiane BIDAULT

Dernière modification : 14 Juin 2012

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