Histoire des communes

Montreuil : Fermincourt

 

Hameau, situé à 4 kilomètres nord de Dreux, renferme après le recensement de 1851 354 habitants répartis sur trois communes dans la proportion suivante : Cherisy 204, Montreuil 145, Abondant 5. Le recensement de 1841 lui donnait 374 habitants.

Cette localité se relie aux plus vieux souvenirs politiques et religieux. Ce fut successivement une ville gauloise, siège d’établissement du culte druidique, et postérieurement sous la dynastie mérovingienne, une résidence royale.

Plusieurs chartes de nos rois sont datées de Fermaincourt et ils paraissent avoir tenus leurs malls (plaids) dans son château.

Fermaincourt, dit le géographe Boudran, était autrefois une ville importante des Carnutes. Les rois de la première race y avaient un château. Ce n’est plus aujourd’hui qu’un bourg avec un pont sur l’Eure, situé à une lieue de Dreux. Le château est en ruines.

Suivant une ancienne tradition locale, les druides y faisaient leurs sacrifices et y élevèrent un autel à la vierge qui devait enfanter.

L’importance dont jouissait Fermaincourt sous la première dynastie de nos rois a fait appliquer à cette localité la tradition portant que les murailles de la ville de Dreux étant tombées de vétusté furent rétablies du temps de Clodion, le second des mérovingiens. La ville de Dreux elle-même, si aux époques gauloise et romaine fut en effet distincte de Fermaincourt, en était très voisine et située sur l’extrémité et le plateau de la côte qui la domine.

La date de l’existence de Dreux sur son emplacement actuel est très postérieure à ces époques et suivit celle de la construction de son château fort sous les premiers comtes de Dreux.

L’agrandissement de cette ville et les luttes guerrières qui eurent lieu sous ses murs, la destruction de son château en 1593, causa la dépopulation et la ruine de Fermaincourt, réduit aujourd’hui à la condition de simple village.

Etymologie de Fermaincourt

Son nom a été formé par la réunion des deux mots latins sous lesquels Fermaincourt est désigné dans les chartes du Moyen-Âge : firma-curia, firmeri-curia fremincuria firmitas-curtis firmati-cortis firmecort. Le premier indique un endroit fortifié firma firmitas (ferme fermeté) lieu où l’on s’affermit, où l’on se fortifie, d’où s’est formé le nom de ferté forteresse.

Ce nom, dit H Martin en racontant que vers 747 l’armée franque avait emporté diverses forteresses ou fertés, indiquait une chose nouvelle, à savoir la transformation des métairies ouvertes en châteaux forts, en tours, en donjons.

Le castrum indiquait généralement une vieille forteresse romaine. La firmitas est une villa changée en forteresse.

On peut donc en conclure que les rois francs qui possédaient Dreux avaient au confluent de l’Eure et de la Blaise une villa, une métairie ou si l’on veut une cour ou court curtis, et qu’ils la firent fortifier. Le mot cour est dérivé de curia (predium rusticum) appartement à l’idome franc : court vient de curtis (mansus).

Dans Varron, le mot chors chortis est employé avec la signification de basse-cour d’une métairie. C’est évidemment le genre d’enclos autour d’une habitation rurale désigné en Normandie par le nom de masure, en Beauce et dans le Perche par ceux de ferme et de bordage.

Dans les derniers temps de l’empire romain, les frontières seules étaient garnies de châteaux forts mais quand, par suite des invasions que firent les tribus germaniques, toutes les provinces de la Gaulle furent devenues successivement des provinces, il fallut aussi les protéger contre les invasions et y construire des forteresses. Les lignes des châteaux forts, s’étendant ainsi de proche en proche, finirent par couvrir de leur réseau toute l’étendue du territoire.

Sous la première race, les princes possesseurs des châteaux, qu’ils avaient construits dans les gaules, s’en attribuèrent quelques-uns comme résidences royales, comme rendez-vous de chasse mais ne pensèrent guère à entretenir les autres et à en accroître le nombre parce que leur coutume n’était pas d’attendre leur ennemi derrière les murailles mais de marcher en rase campagne et de vaincre à la face du soleil.

Beaucoup de châteaux tombaient donc en ruines, mais dans le neuvième dixième siècle, on fut forcé par les irruptions multipliées des Normands de réparer les châteaux forts et d’en construire de nouveaux. On entoura même alors de remparts jusqu’aux monastères.

Quand, sous le règne de Charles le Chauve, les fiefs furent devenus perpétuels entre les mains de ceux qui ne les possédaient qu’à titre temporaire, le nombre des châteaux augmenta considérablement en France.

En effet, chaque seigneur, fier de son titre de suzerain héréditaire et jaloux de le conserver, se cantonna dans son partage et s’empressa de s’y entourer de moyens de défense, soit contre les insurrections de ses vassaux, soit contre les tentatives de ses voisins, soit contre la pensée qui pouvait venir à la royauté de rétracter des concessions impolitiques et ruineuses auxquelles sa faiblesse l’avait contrainte.

Dans la suite du temps, la possession d’un château fort étant devenu le signe de la suzeraineté, tous les nobles qui en étaient investis ou qui prétendait l’être, se hâtèrent d’en élever un dont ils firent leur manoir principal et le siège de leur domination légitime ou usurpée.

Le sol de la France fut alors véritablement hérissé de châteaux forts ou maisons fortes comme on les appelait aussi.

Ces explications un peu longues peut être étaient nécessaires pour faire connaître l’origine de Fermaincourt et les transformations que ce lieu a dû subir avant d’arriver jusqu’à nous.

Le château de Fermaincourt

Dorat de Chameule, auteur de mémoires manuscrites sur Dreux, dit que le château de Fermaincourt avait été bâti au commencement du dixième siècle au confluent de l’Eure et de la Blaise afin d’intercepter le passage de ces deux rivières aux Normands dont les incursions en Beauce devenaient de plus en plus fréquentes. Après ce que nous venons de dire, cette opinion est assez vraisemblable.

Le même motif qui avait porté Robert 1er, comte de Dreux, à édifier le château de la Robertiere l’engagea sans doute à entreprendre de reconstruire le vieux château de Fermaincourt. Quelques auteurs prétendent qu’il ne puit le voir achever avant sa mort, arrivée en 1188, et que son fils Robert II qui lui succéda fit terminer les travaux.

Cependant, nous avons de Robert 1er des lettres passées à Fermaincourt en 1184, datum apud firmamcuriam, par lesquelles il restitue aux chanoines de Saint Vincent aux Bois le moulin de la folie et déclare prendre en sa garde et protection leurs autres possessions et héritages qui étaient dans l’étendue de sa seigneurie. Au nombre des témoins figure Crispin, chapelain de Fermaincourt.

Le domaine de Fermaincourt suivit la mouvance du comté de Dreux. Nous ne rapporterons ici que ce qui le concerne spécialement.

Après que les seigneurs de Fermaincourt eurent fait rétablir leur château pour arrêter les incursions des hordes barbares qui venaient piller leurs terres, ils songèrent à rassembler autour d’eux des moines pour leur demander des remèdes aux blessures de l’âme.

C’est ainsi qu’en 1185, Robert II avait fondé une petite collégiale sous les murs de son château et que nous verrons tout à l’heure Robert IV y établir un prieuré.

Il y avait en outre l’église de Fermaincourt, déjà citée en 1185, mais nous la trouvons mentionnée dès le commencement du douzième siècle.

Deux privilèges, l’un de Geoffroy évêque de Chartres (27 novembre 1126) et l’autre du pape Honorius en date du 8 mars 1127 confirment aux religieux de l’abbaye de Saint Père de Chartres la possession de l’église Saint Martin de Fermaincourt. Le vocable de Saint Martin indique une origine ancienne et au moins mérovingienne.

Nous avons vu qu’elle était située entre les fossés de Fermaincourt et Montreuil.

La tourmente révolutionnaire de 1793 a renversé l’église de Fermaincourt. Il n’en reste plus que des pans de murailles connues sous le nom de ruines de la chapelle Saint Martin. On les voit à gauche sur la route de Dreux à Anet.

1240

Jean 1er fils de Robert III, comte de Dreux, était encore jeune lorsque son père mourut en 1234. Aenor de Saint Valery, sa mère, tint le comté de Dreux avec Henri, seigneur de Suilly qu’elle avait épousé en secondes noces.

Le comte Jean, ayant atteint sa majorité, voulut jouir de ses droits. Il passa un traité avec sa mère et Henri de Suilly par lequel il fut convenu que ce dernier aurait la maison de Fermaincourt et celle de Sainte Gemme et que le comte Jean aurait la maison paternelle de Dreux, avec les deux tours, le jardin et le vivier qui en dépendaient, selon l’estimation qui en serait faite, dans la ville de Fermaincourt.

1249

Robert IV l’aîné des enfants de Jean 1er ne le céda à aucun de ses ancêtres en valeur et en piété.

Trois ans avant sa mort, qui eut lieu en 1282, il fonda et fit bâtir la chapelle de Notre Dame des Sept Joies ou des Pezeris à Fermaincourt.

Il la fit dépendante de l’abbaye de Braine (Robert IV, comte de Dreux et de Montfort, était seigneur de Braine et de Saint Valery) et y mit des chanoines. Mais elle fut, dans la suite, un prieuré de l’ordre des premontés qui devait être desservi par un religieux de la dite abbaye (le prieuré de Fermaincourt est désigné dans le pouillé du diocèse de Chartres en 1738 comme étant de l’ordre de Saint Benoist. L’abbé de Saint Père présentait à ce bénéfice qui avait 950 livres de revenus) La fondation de ce prieuré est mentionnée au martyrologe de l’abbaye de Saint Yves de Braine où l’on faisait la commémoration de Robert IV le 18 des calendes de décembre.

On voit par les termes de ce passage du martyrologe que les religieux de Saint Yves de Braine, établis à Fermaincourt, percevaient chaque année pour la pitance du couvent cent sols tournois sur le tonlieu de cette ville, ce qui suppose une foire ou au moins un marché en cet endroit. C’est sans doute la foire déjà citée et dont il est encore fait mention en 1759.

1315

Lettres de Landry, clerc, chastelain de Fermecourt et garde du scel de la chastelenie de Dreux, portant que Robert le Clerc, chevecier de l’église Saint Etienne de dreus, recognoist avoir donné desarendroit à touz jourzmes sans espérances de retour pour dieu et en ausmone à la communauté de la devant dicte église de Saint Estienne un muid de bled à la mesure de dreus pour estre donné et distribué chacun an en lad église en l’avent en pain à la grant messe en commun a ceuls qui i seront et non à aultres, le dit muy à prendre sur tous ses héritages quiex que ils soient.

1378

suivant lettres passées souz le scel de la prévosté de Paris.
Monseigneur Tristant de Rovart, vicomte de Thouard et comte de Dreux, et madame Perennelle de Thouars, sa femme, vicomtesse et comtesse des dits lieux de lui auttorisée, eschangent, vendent, transportent, quittent et délais sent perpétuellement et héritablement au Roy Charles pour luy, ses hoirs et successeurs et ayant cause, les deux parts entièrement de la dite comte de Dreux, Le Chastel et ville de Dreux tant le principal Chastel que la tour de Dannemarche et le Chastel et chastellerie nommée le palais de Fermancourt et leurs dépendances.

Fait et passé le dimanche XIX° jour de septembre l’an de grâce mil trois cenz soixante et dix huit

1504

Dans les comptes de recettes et dépenses des la ville de Dreux des années 1504, 1505 et 1506, on lit ce qui suit :

La dépense a été pour les réparations aux ponts, portes et autres endroits de la ville et à faire creuser pendant les trois années la rivière neuve, qui va de Dreux à Fermaincourt, pour la rendre navigable et pour la fourniture des bois par la porte à bateau. La dite rivière a été commencée en 1504 et portait bateau en 1506. Les ouvriers qui travaillaient à la creuser gagnaient vingt deniers par jour et les maçons deux sols.

Payé à Jean Destilly et autres manouvriers la somme de cent deux sols. Six deniers tournois pour soixante et une journées et demie de manœuvres à vingt deniers tournois par jour, lesquelles journées ont été employées au cours de la rivière nouvellement faite et édifiée depuis la ville jusqu'a Fermaincourt pour faire passer, dessendre et avaller les bateaux et marchandises par iceluy cours pour le bien public de la ville et ainsi qu’il a été ordonné.

Payé à Jean Destilly et autres manouvriers la somme de dix sept livres dix sous un denier pour vingt huit journées et douze de manoeuvres employées et faites au cours de la rivière navigable de naguère commencée à faire depuis Fermaincourt jusqu’aux fossés de la ville de Dreux.

A Pierre Plomb, bourgeois du dit Dreux, la somme de six livres tournois pour la dépense faite en sa maison des bateliers de Sylvestre Duchesnes et autres qui ont conduit et amené le premier bateau au quai de la rivière navigable de la dite ville.

A Sénéchal de Fermaincourt trois sols six deniers pour avoir baillé du vin aux bateliers conduisant le premier bateau venu en cette ville.

Les deux articles sont du compte de 1506. La ville fournissait aux ouvriers tous les outils nécessaires. La chaux coûtait vingt sols le muid, le banneau de pierres deux sols, le baneau de sable un sol.

On voit aussi dans les comptes de 1512 et 1513 que la pierre de taille achetée à Vernon pour la construction de l’hôtel de ville de Dreux a été apportée jusqu’au quai Saint Jean à Dreux appelé le grand jardin et en cas de manque d’eau dans la rivière, il est dit par le marché qu’on en laisserait un tiers proche la tour de Fermaincourt.

1591

En 1591, des troupes de Henri IV vinrent mettre le siège devant Fermaincourt mais Pierre Châtel de Dreux défendit vaillamment cette place. Elle ne fut prise que l’année suivante par les royalistes qui y mirent pour gouverneur un nommé Clerc, gascon d’origine.

Le château fut ruiné après le siège de Dreux par Henri IV en 1593. On en voyait encore quelques vestiges à la fin du dix-septième siècle au confluent de l’Eure et de la Blaise, en un lieu appelé les gouttières, où existait une habitation connue sous le nom de maison des druides.

Les matériaux provenant de la grosse tour ou donjon de Fermaincourt servirent à construire en 1616 le couvent des capucins à Dreux.

Un croth communiquait de l’emplacement de Dreux, aujourd’hui détruit, avec Fermaincourt. L’entrée en est bien connue mais, ici comme à Senantes, des éboulements n’ont pas permis de vérifier toute l’étendue de cette galerie souterraine.

1731

Alexandre Lefeuvre de la Salverie, chevalier, conseiller du Roy en ses conseils, grand maître enquesteur et général réformateur des eaux et forêts de France au département de Paris et Isle de France, sur ce qui nous a été remontré par le procureur du Roy en la maîtrise des eaux et forêts de Dreux que ce jour d’hier dans le cours de notre visite, il nous avait fait observer que, faute par le propriétaire riverain de procurer l’écoulement des eaux de la prairie du village de Fermaincourt par une conduite d’environ trois cent cinquante toises d’anciens fossez qu’il convient curer et rafraîchir en différents endroits, les dites eaux croupissent et regonfloient dans les rues et jardins du village de Fermaincourt ce qui causoit un préjudice considérable au public et rendoit le chemin impraticable non seulement aux gens de pied et à cheval mais encore pour toutes sortes de voiture, et vidange des bois de la forêt de Crotais lez Dreux, que cette négligence, si contraire à la bonne police même à la conservation de lad prairie, obligeoit led procureur du Roy de nous requérir d’y pourvoir tout considéré. Nous, ayant égard à la remontrance dud procureur du Roy, ordonnons que dans un mois à compter du jour de la publication de la présente, à l’issue de la messe paroissiale du village de Fermaincourt, les propriétaires des héritages scitués au deux côtés des deux ponts dud village et autres endroits nécessaires pour procurer la chutte des eaux dans la grande rivière seront tenus chacun en droit soy de faire faire à leurs frais le long de leurs héritages curer les fossez qui ont été cy devant ouverts et de leur rendre de six pieds de large et trois et demi de profondeur au moins et d’en faire ouvrir de nouveaux et tels que conviendra de manière que toutes lesd eaux puissent avoir un écoulement libre et les rues dudit village de Fermincourt être desséchées et facilement fréquentées à peine de trente livres d’amende contre chacun contrevenant, sinon et à faute de ce faire dans led temps et iceluy passé sans qu’il soit besoin d’autre jugement, ordonnons qu’à la requeste dud procureur du Roy, il sera devant le maître particulier de chaque prairie procédé à l’adjudication au rabais et moins disant de tous les dits fossez, exécutoire de livré au profit de l’adjudicataire, aller contre desd propriétaires d’héritages.

Ordonnons après la perfection desd fossés, les dits propriétaires seront tenus de commettre une personne pour les entretenir de manière que l’écoulement des eaux puisse être toujours libre, sinon il y sera pourvu à la même diligence dud procureur du Roy à leurs frais et despens ce qui sera exécuté nonobstant et sans préjudice de l’appel.

Donné en réformation audit dreu le quatorze septembre mil sept cent trente un
Signé Lefeuvre de la Salviere

Au bas est écrit : enregistré au greffe de la maîtrise des eaux et forêts de Dreux le vingt un avril mil sept cent trente deux
Signé le latteur

1773

nous citerons enfin un procès verbal de bornage dressé le 22 novembre pour limiter la seigneurie de Cussey appartenant au chapitre de Chartres de celle du prieur de Fermaincourt.

Sources : cahier de Joseph AUGER de Marsauceux d'après les annuaires d'Eure-et-Loir


Saisie : Mireille ROUSSEAU

Dernière modification : 1 Septembre 2011

Immeubles

 

Contact Histoire | Plan du site